dimanche 9 août 2009


Entretiens télévisés sur l’Etat de la nation et les grandes questions d’actualité : Houngbédji et Yayi passent à côté de l’essentiel.
Dans le cadre de la fête de l’indépendance, Monsieur Boni Yayi, président de la République s’est prêté aux questions de deux journalistes, deux dames, l’une de la chaine de télévision nationale ORTB et l’autre d’une des télévisions privées proche du pouvoir.
Durant 90 minutes, deux dames ont eu pour mission d’aider le président de la République à repréciser sa vision de la gestion du pays aux béninois, à se prononcer sur les graves questions de malversation et de détournement financier qui ont court sous son régime notamment l’affaire « cen-sad » et bien d’autres choses. En somme faire renaitre la confiance des béninois en leur pouvoir. Cette confiance altérée ou « perdue » depuis les récents scandales financiers et les nombreux problèmes liés à la privation de liberté et de menace sur la démocratie.
La première chose qui a frappé à l’œil lors de cet entretien a été la qualité des propos et le style verbal du président de la République puis ensuite les journalistes : Leur style et leur capacité à contenir l’orateur et à diriger l’émission.
Il faut reconnaitre que le président de la République au-delàs des aveux et des « pardons » répétés à longueur de l’émission n’a pas convaincu les béninois dans leur grande majorité.
En effet, le chef de l’Etat n’a pas répondu avec précision aux préoccupations des béninois mais s’est plutôt borné à demander pardon au peuple ; à rejeter sa culpabilité dans les cas de mal gouvernance, à justifier ses absences aux conseils des ministres…En somme, c’est à un aveu d’échec et d’incapacité à diriger le pays que nous avons eu droit à travers cette émission sur le plan du contenu des propos du chef de l’Etat. Des réponses du président de la République, on peut facilement déduire qu’il n’a pas le contrôle du pays ; que de graves décisions sont prises sans qu’il n’en soit informé. Et si on n'y pas de pas garde tout de suite, le peuple apprendra un jour que sur décision du conseil des ministres une portion du pays a été cédé à un pays voisin et comme à so habituel, Monsieur le président viendra nous expliquer qu'il n'était pas à ce conseil là et nous demander par la même occasion pardon. ....
Sur le plan du style adopté, le président de la République a été très brouillon et pas du tout concis. Très tendu, il a tout le temps monopolisé la parole sans une suite logique dans les idées mais avec un débit de voix trop élevé, trop crié et un fond de colère qui se faisait ressentir dans le ton. Trop de gestes de mains, de tête et des pieds pour un président et sur une émission dont l’objectif est de le réconcilier avec son peuple.
Autre élément handicapant pour la communication du président de la République:
ce tic de « naturellement » qu’il a répété 57 fois en 90 minutes d’émission télévisée
l’évocation de Dieu à temps et à contre temps
cette familiarité ou cette proximité qu’il a voulue créée avec les deux journalistes en les désignant directement par leurs prénoms...bref Le service de communication du palais aurais dû conseiller au président de parler simplement de « madame tel ou tel » pour la courtoisie et l’élégance.
Aussi le président de la République manquait-il de fraîcheur dans le visage et d’aisance dans la voix….
On retiendra au terme de cet entretien l’image d’un président fatigué au style décousu, agité, criant, gesticulant et n’ayant pas du tout convaincu sur comment redonner confiance aux béninois, comment relancer l’économie nationale fouettée par cette crise économique internationale encore moins sur le traitement à faire des béninois et béninoises qui auraient distrait de l’argent public avant ou durant son mandat.
Quant aux deux journalistes à proprement parlées, elles étaient toutes aussi passées à côté du but que le chef de l’Etat. Presque moches, les deux dames à la limite male assise et dans une certaine mesure male habillée étaient disposées en spectatrice et presque indifférentes aux diatribes du chef de l’Etat. Elles arrivaient à peine à bien poser leurs questions; elles manquaient de poigne, de présence et d’écoute. Elles donnaient l’impression de suivre un prêche religieux de mauvais goût.
C’est à tout cela que Maître Adrien Houngbédji, challenger du candidat Yayi à la présidentielle de mars 2006 et probable candidat de l’opposition coalisée au sein des groupes G et F pour la présidentielle de mars 2011, a choisi de répondre deux jours après le show télévisé présidentiel. Cela s’est passé sur une télévision privée, tribune de l’opposition et dirigée par un homme d’affaire et député de l’opposition. Pour la circonstance, il a croisé le verbe avec deux journalistes de la presse privée, deux hommes ; l’un exerçant dans la télévision où a eu lieu l’entretien et l’autre patron d’un organe de presse écrite.
Contrairement au plateau présidentiel, on a noté ici la bonne tenue (style vestimentaire et parlé) des journalistes et de leur interlocuteur. Le candidat de l’opposition contrairement au président de la République a durant toute l’émission soigné son image et a su s’imposer comme un chef, un vrai sage. Un calme serein, des gestes quand il le faut et sans démesure. On sentait que les deux journalistes avaient eux aussi de la matière et qu’ils savaient de quoi ils parlaient ; que c’étaient eux qui dirigeaient l’émission et pas leur invité.
Quelques fausses notes tout de même au cours de ce bel entretien :
Maître Houngbédji aurait pu se passer des attaques gratuites auxquelles il s’est livré contre le pouvoir en place et son chef.
Il aurait aussi pu faire des propositions alternatives plus claires et facilement mesurables et compréhensibles pour le commun des béninois ; tout comme il pouvait, et rien ne l’empêchait, de reconnaitre et de souligner ce qui est bien de tout ce qui se fait actuellement par le pouvoir en place. Par exemple, maître Houngbégji ne peut pas nous dire que parce que certains centres de santé du pays manquent de gynécologues, la gratuité de la césarienne était une mesure inappropriée. Tout comme il ne peut pas nous faire croire que la gratuité des soins pour les enfants de 0 à 5ans est une décision pas bien mûrie….
Il aurait surtout pu éviter de montrer cette image d’homme incapable à tout point de vue qu’il a tout le temps montré du président.
Enfin cette émission a été le lieu où l’histoire politique de maître Houngbédji a rattrapé l’homme. En effet, principal adversaire du président Soglo, candidat à sa propre succession au pouvoir en 1996, maître Houngbédji étaient de ceux qui rejetaient publiquement les bons résultats économiques auxquels étaient parvenus le pouvoir d’alors, soit 6% de taux de croissance alors que nous étions autour de -2% quand Soglo venait au pouvoir. Cet opposant au régime du président Soglo était aussi reconnu comme l’homme du fameux slogan « …On dit qu’on nous fait des pavés partout dans le pays ! Est-ce que c’est les pavés que nous allons manger ?! Soglo peut partir, et il doit partir avec ses pavés pour que nous ayons la paix! »
Voilà dans quelles conditions maître Houngbédji s’était allié à Kérékou, challenger du président Soglo pour le second tour de la présidentielle de mars 1996. Le président Soglo a perdu démocratiquement le pouvoir au profit du général Kérékou ; maître Houngbédji est nommé premier ministre, poste non prévu par la constitution…. La suite tout le monde le sait….
Aujourd’hui et face aux béninois qui hier étaient tous témoins meurtris de l’arrêt brusque du progrès et de la prospérité du pays fraîchement amorcé, maître Houngbédji vient louer les mérites de bonnes gouvernances de celui qu’il avait chassé du pouvoir ; il vient reconnaitre publiquement ces prouesses économiques et vanter qu’il a été le seul à conduire le pays à un taux de croissance aussi élevé depuis l’avènement de la démocratie et dans un contexte de dévaluation du CFA.
Ah, politique quand tu nous tiens !
On peut retenir au terme de ces deux entretiens télévisés une volonté active des deux hommes de convaincre les béninois et les béninoises, de les emmener à adhérer à leur projet de société. Seulement comme je l’ai montré plus haut, aussi bien pour le président de la République que pour maître Houngbédji, il n’a véritablement jamais été question de projets de société ; chacun est venu faire sa démonstration, sa masturbation politico-intellectuelle. Les rares fois que l’un ou l’autre est venu sur des sujets préoccupants pour la nation, des virus et des plus dangereux ont empêché la lisibilité et la compréhension des différents messages. Certes que le président Yayi a fait son show médiatique télévisé, jouant pour lui et pour ces deux amies de la soirée mais maître Houngbédji en voulant prendre sa revanche sur le président et se faux pas est bien passé à côté de l’essentiel avant de tomber dans ses travers du passé.
Enfin je suis bien tenté de dire que c’est une loi ou un théorème en communication pour les Hommes politique au pouvoir ou aspirant à l’être de désigner les journalistes qui les prennent en interview par leurs noms. Là-dessus Houngbédji et Yayi sont du même avis. Au moins ça.

mercredi 5 août 2009


Cinéma : « Comme chez nous » bientôt sur les écrans au Bénin.
Ancien journaliste et présentateur du 20 heures sur la chaine 2 (LC2), animateur d’une émission culturelle sur canal 3 et promoteur d’une agence de production audiovisuelle nommée «belimage», Hervé DJOSSOU, personnage ferme mais timide, effacé et d’un calme parfois inquiétant décide enfin de réaliser l’un de ses vieux rêves : « devenir réalisateur ».
Depuis mars 2009 l’homme a entrepris le tournage et la réalisation de son tout premier film, une série télévisée de 24 épisodes de 26 minutes intitulée « comme chez nous ».
Comme son nom l’indique, ce feuilleton vient peindre et dépeindre les mœurs sociales et politiques béninoises.
Pour l’occasion, c’est une équipe artistique faite de comédiens et de comédiennes, pour la plupart pas des plus connus du grand public et dans le milieu culturel béninois qui est retenue. Ces hommes et ces femmes ont par contre une solide volonté et une réelle capacité de proposer autre chose au public béninois pour peu qu’ils soient dirigés et bien dirigés.
Hervé DJOSSOU entrera dans l’histoire ou n’entrera-t-il pas dans l’histoire du bon et vrai cinéma ? Le tout dépendra du produit que ce jeune réalisateur aura à proposer à son public. S’il reste dans les sentiers battus, dans le flou artistique de tout ce qui se fait au du cinéma et qui ne répond à aucune norme cinématographique mais inonde nos rues, nos vidéothèques et nos feux tricolores constipant le plaisir et l’appétit culturel du consommateur béninois, il se sera « tué » lui-même. Il sera tout simplement comme c’est la mode par ici « un réalisateur de plus ».
Hervé DJOSSOU et toute son équipe ont l’obligation de « sortir du troupeau »- pour utiliser l’expression chère à mon ami Hermas GBAGUIDI; sortir du troupeau et montrer le chemin, quitte aux autres de suivre ou ne pas suivre. Faire ou dire autrement les choses sans vouloir plaire ni déplaire. Ce n’est pas de la prétention que de montrer le chemin, le chemin de l’excellence, le chemin de la qualité cinématographique.
Rien de bon et de grand n’est jamais fait sans un minimum de prétention. La prétention est le socle de toute œuvre qui suscite des questionnements et de l’admiration.
Le Bénin mérite enfin de renouer avec son passé cinématographique des années « Le téké, hymne au borgou », « Ironu », « Debout les morts », « le roi exilé » et bien d’autres produits bien ficelés qui ont fait la fierté et l’honneur du Bénin.
« Comme chez nous » se doit donc de combler les attentes d’un public longtemps sevré d’œuvre cinématographique de bonne facture aussi bien de par la qualité des acteurs que de la réalisation dans son ensemble.
Déjà les extraits passés durant les deux ou trois semaines d’annonce sur la télévision canal 3 ont permis de découvrir un film sobre, juste, digeste et sans prétention moralisante aucune ; des acteurs moulés dans un naturel extraordinaire et enfin des décors très adaptés aux différents contextes. Tout ceci a déclenché bien évidemment un engouement et une forte mobilisation des consommateurs de bien culturels de qualité. Les fleurs jetées aux comédiens et à toute la production pour la qualité des extraits diffusés sur les écrans ne doivent pas être prises pour des couronnes encore moins la manifestation d’une quelconque perfection mais plutôt une invite à mieux faire, à persévérer.
Hervé DJOSSOU et les siens doivent mesurer à sa juste valeur tout l’espoir qu’il porte aujourd’hui et ne pas verser au « finish » dans une rigolade forcée ou encore dans les pitreries de bas étages auxquelles nous sommes confrontés depuis si longtemps en matière de création artistique et culturelle.
Déjà les mois de septembre, octobre et novembre sont retenus pour la deuxième phase du tournage de ce film après le rendez-vous manqué du mois de juillet. Bon vent à toute l’équipe.