mardi 3 décembre 2013

LU POUR VOUS DANS LE JOURNAL "LA NOUVELLE TRIBUNE"

Départ en exil du juge Houssou : réaction de l’honorable Lazare Sèhouéto

Lazare Sèhouéto, député
« Le juge Houssou connaît le système. Il connaît les hommes. Il sait la fort détestable manie de Yayi de ne reculer devant rien de légal, de légitime, de moral. » Ma réaction se déclinera en trois points :
1) Un père de famille ne laisse pas femme et enfants derrière lui pour s'en aller pour le plaisir de s'exiler, d'autant plus qu'il a une carrière devant lui et qu'il n'est pas un miséreux. Le départ du juge HOUSSOU vers d'autres cieux relève d'abord d'un drame humain. Je lui souhaite du courage. Tout ce dont ce pays regorge de précieux l'accompagne.
2) A force de manipuler la justice, de tenter de lui enlever toute crédibilité, de faire preuve de cynisme froid en utilisant les procureurs à des besognes peu honorables et en les jetant successivement comme de vieilles chaussettes (George Constant Amoussou connaît son sort, Justin Gbènamèto découvrira le sien, Gilles Sodonon comprendra...), le Président Yayi Boni a fini par convaincre les acteurs de la justice, eux-mêmes qu'ils ne peuvent compter sur rien: ils ne sont protégés par rien, ni par la loi dont personne ne tient plus compte, ni par la morale (mot inexistant dans le dictionnaire de la conscience présidentielle au Bénin) encore moins par la clameur publique, rendue inaudible depuis des lustres... Si Lionel Agbo, avocat de son État, croyait en la Justice, se trouverait -il aujourd'hui en exil ? On me dira, c'est un avocat, ce n'est qu'un auxiliaire de justice. Mais le juge Houssou, du 6eme Cabinet, à qui il a été confié coup sur coup plusieurs dossiers délicats, trop délicats pour un magistrat en tout début de carrière. Ce même juge a jugé en son âme et conscience et a estimé que les affaires délicates à lui confiées par son cousin de procureur Gbènamèto, ne méritaient pas qu'on poursuive les mis en cause. Avant de prononcer ses "non-lieu", il prit ses dispositions pour se mettre hors d'atteinte. Il connaît le système. Il connaît les hommes. Il connaît leurs vilaines manières de n'avoir aucune limite. « Il a été arrêté afin que sa sécurité soit assurée », expliqua le gouvernement.
En dépit et malgré toutes les tracasseries, soutenu par la solidarité et la pugnacité de ses collègues magistrats, il se remit à travailler. Puis il fut brandi contre lui, l'arme de la poursuite judiciaire. Il connaît le système. Il connaît les hommes. Il sait la fort détestable manie de Yayi de ne reculer devant rien de légal, de légitime, de moral. Il sait aussi qu'il peut se trouver certains de des collègues pour exécuter la sale besogne. Et le voilà aux États Unis.
Si les acteurs de la justice ne peuvent faire confiance en leur propre maison, pour que justice soit faite, qui peut s'y fier ?
Yayi a poussé son machiavélisme très loin, il a détruit la maison justice, ou presque. Il a détruit l'indépendance de la justice ou presque. Il a détruit la confiance que les citoyens pouvaient accorder à la justice. Il paraît qu'il y a des juges corrompus. Qui sont leurs corrupteurs ?
Chaque Zémidjan de Cotonou peut vous en compter. Jamais, notre pays n'a atteint ce niveau de pourriture, malgré nos tares, nos péchés mignons qui avaient cours depuis nos indépendances jusqu'en 2006. Jamais le pouvoir politique n'a osé manipuler aussi grossièrement l'appareil judiciaire que ne le fait Yayi Boni depuis 2006. Combien de temps mettrons nous à remettre de l'ordre ? Qu'est-ce que cela nous coûtera ?
3) Insécurité juridique, instabilité judiciaire. Imprévisibilité. Ces mots, tout simples, portent une charge, disons une chape de plomb, que Yayi Boni a déposé et pour longtemps, sur la crédibilité de notre pays. A part le montage obscur de la cimenterie Nocibé, à qui il a été concocté un régime d'investissement spécial, mis en vigueur par ordonnance présidentielle, en lieu et place de l'Assemblée Nationale, quel investisseur privé s'est installé au Bénin depuis 2006 ?

Personne, aucun investisseur censé ne s'installe dans un pays sans sécurité juridique et judiciaire. La rocambolesque histoire du juge Houssou vient parachever un paragraphe de la destruction progressive du pays: elle révèle que personne ne se sent en sécurité au Bénin, sauf allégeance à l'anachronique Monarque, dont le culte injurie notre intelligence à chaque carrefour de Cotonou et dans chaque dossier de l'Etat. C'est l'une des plus retentissantes et destructives publicités que Yayi Boni a réussies à faire pour le Bénin, avec ses histoires d'empoisonnement, de coup d'Etat, de magistrats corrompus, et autres. Pendant combien de temps, nous-mêmes et nos enfants payeront pour tout ça ?

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