Comme d’habitude, c’est à travers
de géants panneaux publicitaires que les béninois ont eu l’annonce de la nouvelle.
A tous les grands carrefours, dans les feux tricolores ainsi que dans les
villes les moins importantes du pays, le pourvoir de Yayi Boni, en ces temps de crise
sociale sans précédent, a fait disposer des affiches géantes à l’effigie du
chef de l’Etat, invitant les populations à un méga spectacle dans le cadre de
l’an trois du deuxième mandat de celui-ci. Et pourtant, il y a mieux et plus urgent.
La chose étonne plus d’un béninois
en ce moment même où depuis le mois de janvier, écoles, collèges, lycées et
universités publiques sont fermées pour fait de grèves. Il en était de même
pour les tribunaux et les hôpitaux qui, dans un passé récent, ont levé leurs
motions de grève en donnant un moratoire au gouvernement.
Monsieur Yayi Boni, Président de la République du Bénin.
Les tractations engagées par le
pouvoir pour la levée de la motion de grève dans le secteur de l’éducation et
celui des finances n’ont toujours pas abouti. Et pour cause, les fédérations et
centrales syndicales qui animent ces secteurs exigent le limogeage du préfet
des départements de l’Atlantique et du littoral, et du commissaire central de
la ville de Cotonou, auteurs du bain de sang mémorable sur des syndicalistes
lors d’une marche pacifique déclarée en décembre 2013.
Depuis lors, c’est
l’impasse totale. Le pouvoir ne semble
pas prêt à se séparer d’un préfet et d’un commissaire de police dont il ne
regrette ni ne condamne la brutalité et la barbarie exercées sur des
syndicalistes sans défense dans l’exercice de leur droit.
Ainsi depuis trois mois, écoliers, élèves, lycéens et étudiants sont
livrés à la rue ; à la débauche. Les cas de prostitutions, d’avortements,
de noyades et autres accidents routiers liés à la divagation de certains de ces
derniers sont légion. Parents et apprenants sont anxieux de voir l’année
scolaire et académique déclarée blanche ou invalide. Le président de la
République, enfermé dans sa logique d’une gouvernance aveugle et basée que sur
sa seule « intelligence » et « savoir », refuse d’entendre
le cri de cœur de millions de ses compatriotes en détresse sur le plan social,
politique et économique. Et c’est dans un tel contexte qu’intervient l’annonce
d’un méga spectacle pour célébrer l’an trois de Yayi Boni au pouvoir, réélu en
deux mille onze par un fichier électronique tronqué depuis sa conception, et
qui a produit un cahot dont les principaux acteurs n’ont pas manqué de place au
gouvernement et dans bien d’autres institutions de la République.
Les chantres de cette
manifestation qui s’inscrit complètement à l’antipode des besoins, soucis et
souhaits immédiats du peuple béninois sont connus : C’est d’abord le
ministre en charge de la culture, un homme carrent qui a montré ses limites à
l’économie maritime d’où il a été viré sans ménagement devant caméra par le
même chef de l’Etat. Et comme d’ordinaire au Bénin, c’est les hommes sans aucun
bagage intellectuel, sans aucun b-a ba de la culture que l’on projette à la
tête de ce secteur que nos dirigeants confondent facilement à un poste de remerciement aux activistes et autres médiocres du lot, Jean
Michel ABIMBOLA a été parachuté au département de la culture, où sa seule
préoccupation est de montrer au chef de l’Etat que les artistes le
soutiennent. Evidemment, Monsieur Yayi Boni ne rêve que d’entendre :
«…Nous vous soutenons, monsieur le Président …».
A côté du ministre Jean-Michel,
certains artistes qui ne ratent aucune occasion pour rencontrer le chef de
l’Etat. On y trouve des musiciens comme
des gens de théâtre. Heureusement pas des meilleurs! Ils savent que rencontrer Yayi est une aubaine ; il sort
toujours le fric même si ce n’est pas cela l’objet de votre visite. Du coup, le fond de commerce est tout trouvé. Toutes les occasions sont bonnes pour rencontrer le chef de l'Etat et se faire de l’argent,
disons clairement les choses !
Qu’il vous souvienne que le jour de l’an au
petit matin à cinq heures, certains de ces artistes munis de guitares, de
gongs, de grelots, de castagnettes…. attendaient déjà dans la rue du chef de l’Etat, accompagnés du ministre
Jean-Michel, pour disent-ils, souhaiter leurs vœux du nouvel an au président. Donc,
en terme d’artistes, c’est en réalité une bande d’escrocs réputés que le
ministre Jean-Michel réussit toujours à
mobiliser autour de lui, pour cette
traditionnelle kermesse mal conçue et mal exécutée, que Yayi aime voir et
entendre. Et pour ce dimanche six (6) avril 2014 sur l’esplanade intérieure
du stade de l’amitié, la honte et le déshonneur étaient bien de la partie.
Honte et déshonneur aussi bien
pour Yayi Boni principal inspirateur de cet anachronisme populaire, que pour ce public qui, faut-il le rappeler, a
massivement fait le déplacement.
Comment des gens dont les enfants ne vont plus
à l’école, du fait de ce même Yayi depuis trois mois, en sont-ils arrivés à
accepter d’aller à ce type de festin déshonorable pour eux ? Les élèves et
étudiants de même que les parents d’élèves présents dans la masse auraient-ils
préféré cette kermesse; cette foutaise et cette injure à leur détresse à leur propre avenir ou à celui de leurs enfants? La
présence massive du public aux manifestations d’hier est bien la preuve que la
sortie de l’auberge n’est pas pour demain, et que malgré la lutte et la démocratie, le chemin reste long!
Mais en réalité, une petite
enquête montre qu’une importante partie de ce public a été déplacé à coup
d’argent, comme le régime en a l’habitude ! En effet, déversé par vague
sur les lieux de la manifestation depuis le matin, ce public ramassé et embarqué dans des
camions affrétés par les organisateurs, a été rémunéré qui, à deux milles francs CFA ; qui, à cinq
mille francs CFA; et qui d’autres encore à mille francs CFA. Comme quoi, le pouvoir a choisi sa
cible ; il a choisi bien des nécessiteux, des gens qu’il sait pouvoir
tenir par le ventre. C'est bien dommage!
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